samedi 24 janvier 2009

118 - Le triomphe de l'esthète

Elle aimait déplaire. Grande, belle, riche, elle remerciait les serveurs en crachant dans les coupelles, prenait congé de ses amis avec des mots cassants, émettait des critiques négatives sur les oeuvres d'artistes prodigues.

Détestée de tous, la vipère hautaine plut à l'auteur de ces lignes, esthète notoire. Je lui déclarai mes feux d'un crachat au visage. Sa gifle scella notre idylle. Couple maudit doublement honni, nous accouchâmes d'un enfant et d'un livre. Précisons que l'enfant était l'oeuvre de la mère, le livre le fruit de ma plume.

L'enfant fut baptisé Nestor, le livre fut intitulé Pastor.

Le premier n'avait rien d'extraordinaire, le second en revanche était une fort belle chose qui eut un succès retentissant auprès de l'espèce lettrée. Je répudiai la génitrice d'une si piètre oeuvre issue d'une inesthétique, laborieuse grossesse, tout au succès de mon ouvrage enfanté quant à lui dans les bercements légers, enchanteurs des muses.

Enfin je pris pour épouse définitive la Poésie, mère autrement plus féconde, flanc prolifique donnant plus de chefs-d'oeuvre que n'importe quel ventre femelle.

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